
Reformer la fiscalité pour diversifier l'économie
1. INTRODUCTION
Convaincu que le système fiscal algérien, dans ses fondements actuels et dans son organisation, est un des obstacles qui s’oppose aux nécessaires réformes de l’économie algérienne, CARE, le Centre d’Action et de Réflexion pour l’Entreprise, a choisi de mettre
aujourd’hui sur la table un ensemble cohérent de vingt mesures conçues pour le transformer en profondeur.
Notre association, fidèle en cela à la vocation qui a toujours été la sienne, en appelle au débat le plus large sur un sujet qui intéresse fondamentalement le monde de l’entreprise et, par-delà, les citoyens algériens dans leur ensemble.
1.1. Depuis longtemps maintenant, toutes les analyses, y compris au sein des instances officielles, convergent sur la nécessité de transformer en profondeur un système fiscal inéquitable, inefficace et peu stimulant pour la croissance économique. Toutefois, en dehors de retouches parcellaires et épisodiques, les diagnostics n’ont jamais été suivis de réponses appropriées sur le fond, à la hauteur des problèmes posés. De ce point de vue, même si elles ne sont pas encore rendues publiques dans leur détail, les propositions qui sont formulées actuellement par les autorités ne semblent pas déroger à ce constat.
1.2. Or, avec la crise sévère qui frappe l’économie nationale depuis quelques années déjà et qui est appelée à sévir dans la durée, les distorsions du système fiscal en place sont de plus en plus visibles et complètement mises à nu :
- la fiscalité pétrolière, qui constituait jusque-là l’armature centrale du système fiscal algérien est appelée à diminuer inexorablement, avec le processus de baisse, déjà en cours, des réserves du sous-sol algérien et, surtout, avec les pressions qui s’exercent au plan mondial
dans le sens du recul des énergies fossiles ; la place grandissante de l’économie informelle qui dissimule des ressources importantes que l’administration ne sait pas appréhender, à un moment où la pression fiscale se fait de plus en plus pesante sur les entreprises du secteur formel et sur les revenus salariaux ; - l’absence de lisibilité du système fiscal et sa faible transparence favorisent les phénomènes structurels de fraude et, surtout, ne contribuent pas à créer un environnement économique stimulant pour les investisseurs et les producteurs ; l’imprécision ou les contradictions qui caractérisent un grand nombre de dispositifs fiscaux laissent des marges de manœuvre excessives à l’administration, ce qui est une source potentielle de comportements bureaucratiques, sinon de corruption ;
- enfin, l’indigence de l’information sur les rendements de chaque type d’impôt et l’absence de toute forme sérieuse de contrôle parlementaire favorisent un mode routinier de gestion de ce système fiscal qui n’aide pas à le faire évoluer avec le temps et à en améliorer les performances.
1.3. Tous les diagnostics et observations aboutissent au même constat : notre système fiscal est dysfonctionnel. Une grande part de l’activité économique nationale est installée depuis longtemps dans une sorte d’informel quasi-légalisé, d’importantes masses d’argent y circulent que l’organisation en vigueur de notre système fiscal ne s’est jamais donné les moyens d’appréhender. La pression des prélèvements pèse alors d’autant plus lourdement sur les entreprises du secteur formel et sur les revenus salariaux. Toutes ces distorsions ont pour effet d’éroder l’efficacité des politiques économiques publiques, sinon de les rendre totalement
inopérantes.
1.4. La présente réflexion vise simplement à décrire et proposer ce que pourrait être un système fiscal fonctionnel, dont la pression serait répartie sur tous les contribuables, et qui permette de construire une économie plus diversifiée et de moins en moins dépendante de la rente.
1.5. Cette modeste contribution ne vise pas à convaincre ceux qui parient, à tort ou à raison, sur un prolongement de la rente actuelle ou sur la découverte de nouvelles rentes.
1.6. Elle ne vise pas non plus à convaincre ceux qui, à tort ou à raison, font la confusion entre la tradition ancestrale de solidarité des algériens et la répartition autoritaire par l’État central d’une rente tirée d’une richesse commune du sous-sol de l’Algérie. Les propositions de réforme fiscale formulées ici ne s’adressent donc pas à ceux-là qui parient implicitement, à tort ou à raison, que les recettes provenant aujourd’hui de la rente pourront être remplacées, demain, par des impôts que les algériens accepteront de payer, ou qu’ils seront contraints et forcés de payer.
1.7. Cette contribution de CARE s’adresse plutôt à tous ceux qui cherchent des solutions concrètes pour sortir de l’impasse actuelle et pour jeter les bases d’un système fiscal qui soit en mesure d’accompagner de manière harmonieuse l’indispensable diversification de l’économie algérienne.
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